Notre ami Armand Farrachi analyse et décrypte la préoccupante partialité de l'état suite au drame de SIVENS ...
Deux
poids, deux mesures, voilà la devise que les gouvernements de notre
république marchande, de droite ou de gauche, devraient faire graver aux
frontons des palais de Justice.
La zone humide de Sivens a été
dévastée pour un barrage censé augmenter encore les surfaces en maïs, et
donc l’usage des pesticides, l’élevage "hors sol" et l’agriculture
industrielle, au profit d'une vingtaine d'exploitants, sans égards pour
la "biodiversité", les ressources naturelles et la santé publique.
Qui
a pris l‘initiative de ce saccage ? Les "djihadistes verts", comme les
appelle la FNSEA, ou un Conseil général tout dévoué à l'agriculture
intensive ?
Un jeune homme a été tué en manifestant contre ce
barrage. Ses camarades en colère ont certes jeté des cocktails Molotov
et cassé des vitrines, témoignant ainsi que tous les Français ne sont
pas anesthésiés. Mais qui est dénoncé pour sa violence et pour son
"extrémisme" ?
Qui sont les casseurs ? Ceux qui détruisent la nature,
ceux qui tuent, ou ceux qui protestent contre ces agressions ? La
grenade mortelle n'est pas même appelée "bavure". Le coup de pied dans
la vitrine est appelé "violence". Deux poids, deux mesures.
Des pratiques inhumaines et violentesUn industriel
construit actuellement une "ferme" pour incarcérer 1.000 vaches dans la
Somme, quitte à polluer toute la région avec le lisier. Qui le jugera
pour ce saccage prémédité ? En revanche, contre les opposants qui ont
dévissé des boulons de cette "ferme", on vient de requérir quatre mois
de prison. Deux poids, deux mesures.
Les militants pacifistes qui
avaient manifesté leur opposition à une chasse à courre en forêt de
Rambouillet, (celle où Gérard Larcher, président du Sénat, va trouver
ses menus plaisirs de tueur de cerfs) ont été condamnés pour "violence"
suite à une mise en examen par une juge d’instruction ouvertement
pro-chasse du tribunal de Versailles.
Des témoins portent plainte
actuellement contre ce même équipage de Bonnelles-Rambouillet, qui, ce
25 octobre, a poursuivi un cerf jusque dans l'étang communal de
Saint-Léger-en-Yvelines pour le noyer sous les yeux des enfants, au
mépris de toute législation et de toute décence. Les plaignants sont
aussitôt menacés physiquement par les contrevenants. Qui sont les
violents ?
Mais qui serait prêt à parier que le tribunal de
Versailles se montrera aussi sévère avec les chasseurs qu’avec leurs
adversaires, et qu’il n’y aura pas, là encore, deux poids et deux
mesures ?
Les militants anti-corrida ont été condamnés ce 13 octobre
par le tribunal de Dax à 3.000 € d’amende chacun pour avoir manifesté,
certes sans autorisation, leur opposition à la torture tauromachique à
Rion-les-Landes. En revanche les exactions physiques exercées par des
aficionados qui avaient violemment agressé, frappé et blessé les mêmes
militants non-violents à Rodhilan (huit blessés), après avoir tous été
identifiés au terme de trois ans d’enquête, peuvent dormir tranquilles :
leur agression en bande organisée n’a toujours pas été jugée. Deux
poids, deux mesures.
Les lobbys, plus puissants que les citoyens La
loi, qui, dans une république, est censée défendre l'intérêt général et
le bien public est donc devenue l'instrument d'une classe, d'une caste,
d'intérêts privés, de la violence productiviste. Elle a rétabli le
délit d'opinion. Elle rendra coup pour coup. L’opposition à la chasse à
courre gagne-t-elle du terrain ? À la demande du lobby chasse, un décret
"d’obstruction à la chasse" criminalise aussitôt les opposants.
L’idée
d’un jour sans viande dans les cantines fait-elle son chemin ? À la
demande du lobby de la viande, un décret rend les produits d'origine
animale obligatoires à tous les repas dans la restauration collective.
On
conteste la corrida ? À la demande du lobby taurin, les manifestations
sont interdites près des arènes et on classe la torture tauromachique au
patrimoine immatériel.
Dénonce-t-on le gavage des canards ? À la
demande de l'Institut technique de l'Aviculture, soutenu par l'INRA, le
repas gastronomique français est classé au patrimoine mondial.
Les
loups reviennent-ils sur leurs territoires ? À la demande de "la filière
ovine" et du lobby cynégétique, la chasse au loup en battue est
ouverte, au mépris de la protection dont bénéficie en principe cette
espèce menacée.
La France, le pays le plus naturophobe de l'Europe Et que ne dirait-on pas dans le domaine de l'énergie, de la santé, du travail et de tant d'autres ?
La
principale fonction de la classe politique, comme elle s’appelle
elle-même, est claire : obéir aux lobbies extrémistes. La France est
assurément le pays les plus anti-écologiste, le plus naturophobe, le
plus ennemi des animaux de toute l’Europe.
Les militants écologistes
luttent chez nous sur le front le plus dur, contre les groupes de
pression les plus puissants, les plus violents. Les décisions
judiciaires partisanes qui établissent un crime de lèse-productivisme,
aussi bien que la sémantique utilisée dans la presse, invitent à
s'interroger non seulement sur la notion de Justice mais aussi sur celle
de Droit, et donc sur "l'État de Droit", qui n’est plus alors que la
raison du plus fort, qu’on appelle aussi "loi de la jungle".
Pour
faire la différence entre la destruction de la nature et un bris de
glace, il serait pourtant urgent que les citoyens utilisent eux aussi
deux poids et deux mesures.
Armand Farrachi.